
SYNDROME DU COEUR DE L'ATHLÈTE
Le cœur d’athlète comprend l’ensemble des modifications cardiaques secondaires à la pratique d’activités physiques répétées et de haute intensité. L’hypertrophie cardiaque, ou un cœur dont le volume ou l’épaisseur du muscle a augmenté, est une des modifications qui peut être observée.
La compréhension de cette condition nécessite de revoir quelques notions de base.
Une pompe musculaire
Le cœur est un muscle qui propulse le sang dans le corps à chacun de ses battements, assurant ainsi la circulation sanguine. Plusieurs conditions peuvent provoquer l'augmentation du volume et l'épaisseur de cette pompe musculaire ou ce que l’on désigne comme du « remodelage cardiaque ».
De la même façon qu’une personne pratiquant régulièrement des exercices de musculation développe des muscles plus proéminents, quand le cœur rencontre une résistance à éjecter le sang, il devient plus musclé et l’épaisseur du muscle du ventricule gauche augmente.
Ce changement dans la structure cardiaque se nomme hypertrophie.
Les activités physiques ne sont pas toutes égales
L’activité physique peut à elle seule entraîner un remodelage de la cavité du ventricule gauche. Mais attention, le type d’activité à laquelle il est fait allusion ici se situe au niveau athlétique. Par exemple, pratiquer un jogging d’une heure 3 fois par semaine ou s’adonner à des exercices de musculation 4 fois par semaine ne sont pas des activités suffisantes pour entraîner un remodelage cardiaque significatif.
Qui peut-on qualifier d'athlète?
Alors, comment définir un athlète?
C’est un individu, jeune ou vieux, amateur ou professionnel, engagé dans un entraînement physique régulier et qui participe à des compétitions officielles à différents paliers, tant localement qu'au niveau international.
Les athlètes ne développent toutefois pas tous un remodelage ou « cœur d’athlète ». En plus de pratiquer un sport de façon régulière, il faut la rencontre de 2 éléments bien précis :
- une haute intensité d’entraînement;
- une charge (ou volume) d’entraînement élevée.
Que veut dire une haute intensité d’entraînement?
Un entraînement demandant un effort suffisant pour atteindre une fréquence cardiaque d’au moins 75 % de la fréquence maximale préétablie en fonction de l'âge.
Qu’en est-il de la charge d’entraînement requise?
Les entraînements de haute intensité doivent être répétés de façon significative :
- au moins 7 à 10 heures par semaine;
- pendant un minimum de 3 mois.
Chaque sport possède des caractéristiques différentes
Les sports ne sollicitent pas tous le cœur de la même façon. Puisque le type d’activité réalisé par un haltérophile diffère nettement de celui d'un marathonien, l’impact ou le remodelage sur le ventricule gauche est différent.
L’entraînement classique en puissance d’un haltérophile en est un d’hypertrophie musculaire concentrique, c’est-à-dire que le ventricule gauche développe un muscle uniformément épaissi.
Pour sa part, l’entraînement en endurance d’un coureur de marathon cause plutôt une dilatation de la cavité ventriculaire gauche; celle-ci s'élargit et s’agrandit, sans s’accompagner d’un épaississement du muscle du ventricule. On parle ici aussi d’une hypertrophie, mais excentrique.
Une hypertrophie excentrique, ou une cavité élargie, permet un plus grand volume sanguin éjecté à chaque battement. C’est pourquoi ces athlètes ont très souvent une fréquence cardiaque plus lente au repos.
Il est même possible que ces athlètes possèdent une fraction d’éjection (capacité de contraction du cœur) légèrement réduite au repos, phénomène que l’on peut objectiver à l’aide d’une échographie cardiaque ou résonance magnétique cardiaque. Cela se produit car le maintien du flot sanguin au repos est assuré par un plus grand volume de sang éjecté à chaque battement. La fraction d’éjection revient toutefois rapidement à sa valeur normale avec l’effort.
Un grand choix de possibilités
Outre ces 2 formes de sport diamétralement opposées, il existe un éventail de situations sportives.
Le remodelage ventriculaire gauche s’effectuera alors selon les différents niveaux d’endurance (élargissement du cœur) et de puissance (épaississement du cœur) qu’exigent ces efforts différents.
Pour s’y retrouver, un regroupement est nécessaire
Les spécialistes du sport et de la cardiologie sportive proposent une classification des sports en 4 regroupements :
- puissance (lutte, haltérophilie, ski alpin) – épaississement du muscle du cœur;
- endurance (cyclisme, triathlon, rame) – élargissement de la cavité du ventricule gauche;
- mixte (soccer, hockey, football américain) – épaississement et élargissement de la cavité ventriculaire gauche;
- adresse (golf, curling, tennis de table) – peu de remodelage.
Différences observées entre les genres et les ethnies
De façon générale, les femmes ont un remodelage moins important que celui des hommes. La dilatation de la cavité ventriculaire gauche est moins marquée et l’hypertrophie concentrique, ou l’épaississement du muscle cardiaque, est également de moindre importance.
Des différences marquées entre les ethnicités sont également bien décrites. Il a été constaté que les athlètes de descendance afro-caribéenne peuvent développer un remodelage secondaire plus important à l’entraînement par rapport aux athlètes d’autres origines ethniques.
En conclusion
Pour évaluer le remodelage cardiaque en lien avec l’entraînement et la présence d’hypertrophie cardiaque d’un athlète, on doit tenir compte des facteurs suivants :
- type de discipline sportive;
- intensité et volume d’entraînement;
- sexe;
- ethnie.
Ce travail diagnostique représente un défi car le remodelage cardiaque induit par l’entraînement est parfois difficile à discerner de certaines cardiomyopathies ou autres processus pathologiques (maladies du cœur); l’athlète peut donc se retrouver à risque dans la poursuite de ses entraînements et compétitions.
Qu’en est-il du ventricule droit?
Le remodelage du ventricule droit ne s’effectue que lors d’activités de sports d’endurance. Dans ce cas, la dilatation de celui-ci sera similaire à celle de la cavité du ventricule gauche. Le médecin parlera alors d’une dilatation balancée ou harmonique. Le muscle du ventricule droit ne s’épaissit pas en lien avec la pratique d’exercices physiques, il s’agit plutôt d’un phénomène anormal.
Arythmies potentielles
Les athlètes de haut niveau peuvent souffrir de palpitations et certaines arythmies sont plus fréquentes dans ce groupe de personnes. C’est le cas de la fibrillation auriculaire, un dérèglement de l’électricité à la hauteur des oreillettes.
- Fibrillation auriculaire
Lorsque ce type d’arythmie est présent, celui-ci requiert les mêmes soins que ceux donnés à d'autres personnes atteintes d'un problème semblable quant à son contrôle et à la prévention d'un AVC.
Nous pouvons également élaborer sur 2 autres troubles du rythme possibles :
- Extrasystoles ventriculaires
Les extrasystoles ventriculaires sont un autre type d’arythmie rencontré chez les athlètes. Elles sont toutefois retrouvées aussi fréquemment dans la population générale et ne représentent pas un risque dans la grande majorité des cas.
- Tachycardie ventriculaire
Un petit sous-groupe d’athlètes développera des extrasystoles ventriculaires incessantes, donnant lieu à de la tachycardie ventriculaire.
Bien qu’étant un phénomène encore incomplètement compris, cette arythmie peut survenir lorsque l’athlète développe une réorganisation de l’épaisseur du muscle cardiaque ou de la grosseur de la cavité ventriculaire de façon extrême et pathologique. Ce type d’arythmie représente alors un danger pour l’athlète et peut l’empêcher de poursuivre ses activités de compétition.
Réversibilité
L’arrêt de l’entraînement de haut niveau permet aux cavités et aux parois ventriculaires de retrouver leurs dimensions normales dans la très grande majorité des cas.
Il n’y a pas encore de véritables conséquences à long terme clairement confirmées, bien que des études plus récentes aient démontré des séquelles cicatricielles mineures chez certains athlètes vétérans.
Produits nocifs pour le cœur
La situation sera différente si, en plus des effets d’un surentraînement, il y a une atteinte myocardique par des produits pouvant être toxiques pour le muscle cardiaque.
Une des causes de la cardiomyopathie toxique est la prise de substances dopantes dont l'effet augmente la performance de l’athlète. La liste est longue et comprend entre autres des stimulants tels que les amphétamines et les décongestionnants, les stéroïdes anabolisants et l’hormone de croissance pour ne nommer que ceux-là.
Fléau répandu
Ces agents sont bien présents dans le monde sportif et il n’y a pas que l’élite qui en utilise. Ils sont disponibles partout et facilement accessibles à tous. Ce qui est encore plus inquiétant est qu’il y a beaucoup moins de contrôles sur l’antidopage chez les sportifs amateurs qu’au niveau professionnel.
Un aveu difficile, mais nécessaire
De façon générale, l’aveu d’une telle utilisation à son médecin est pénible. Le rôle du professionnel de la santé est de veiller au traitement et à la prévention des problèmes de santé de son patient. Le fait de dissimuler cette information n'est d'aucune utilité puisque les analyses sanguines du patient dévoileront au médecin certains des effets du dopage.
Les cardiomyopathies toxiques peuvent causer des dommages permanents dont une possibilité d'arythmie, menaçant la vie même de l’athlète.