
Épisode 1- Dr LUDWID REHN
Ludwig Rehn, chirurgien de formation, est né en Allemagne le 13 avril 1849. Considéré comme un innovateur, il deviendra le chirurgien en chef de l’hôpital de la ville de Francfort.
Pendant ses premières années de service, le cœur était un organe sans aucune chirurgie possible… du moins c'était ce que l’on croyait!
Dr Théodore Billroth, chirurgien et père de la chirurgie digestive, disait à l'époque que « le chirurgien qui tenterait de suturer une blessure du cœur perdrait le respect de ses confrères ».
Dr Stephen Paget, chirurgien anglais, est connu pour avoir proposé une théorie sur les métastases. Il disait, en 1896, que « la chirurgie du cœur a probablement atteint les limites imposées par la nature à toute chirurgie ».
Un jeune homme au sol
Le 7 septembre 1896, un policier trouve au sol, en pleine nuit, un jeune homme de 22 ans, ivre, du nom de Wilhelm Justus. En retirant sa main ensanglantée couvrant sa poitrine, le policier s'aperçoit que l'homme a été poignardé. Il conduit cet infortuné personnage à l’hôpital de Frankfort.
Le chirurgien de service cette nuit-là est Dr Ludwig Rehn. En examinant le malheureux, il constate qu’il est en détresse avec une tension artérielle très basse, agonisant!
Il glisse une sonde métallique dans la plaie profonde du thorax et la voit bouger en harmonie avec les battements cardiaques.
Cette plaie au cœur ne présentait aucun traitement possible. Le jeune homme était voué à une mort certaine, si ce n’était pas de ce bon samaritain de chirurgien.
Le coeur, un organe protégé
Bien que la nature protège le cœur par le sternum (ce mot tire son origine du grec « sternon » et signifie cuirasse de soldat), il est également abrité par son enveloppe, le péricarde. Le péricarde est une pochette fibreuse offrant une certaine fermeté.
Quand quelque chose, tel un corps étranger, traverse le péricarde, le ventricule droit protège le ventricule gauche en étant placé devant lui.
Pris au piège
Mais notre ami poignardé avait une lacération au ventricule droit. Le sang qui s’en échappait était pris au piège dans la pochette du cœur car l’ouverture faite par la pointe de la lame n'était pas assez importante pour le vidanger. La pression ainsi exercée sur le cœur l'écrasait tout comme si on l'étouffait à mains nues. En terme médical, il s'agit de « tamponnade cardiaque ».
Première chirurgie cardiaque
En salle d’opération, le Dr Rehn a ouvert le péricarde davantage, le libérant de son contenu et dégageant par le fait même le cœur de sa fâcheuse position.
Une fois le cœur exposé, c'est-à-dire après que le péricarde ait été ouvert davantage, le Dr Rehn a pu voir la plaie de 1.5 cm (½ po) sur le ventricule droit. Du sang sortait simultanément de la plaie à chaque contraction cardiaque.
Le chirurgien a alors fait une suture (couture) autour de la plaie en exerçant une légère pression avec son index gauche. Il a ensuite tiré doucement sur les deux extrémités du fil de suture, en veillant à ne pas déchirer le ventricule droit dont la consistance est plutôt mince.
Le geste se compare à celui que l'on fait pour fermer un sac à main ou tout autre article muni d'un cordon.
Le saignement s’est arrêté et la première chirurgie cardiaque venait d’être réalisée!
En médecine, comme dans bien d'autres domaines d'ailleurs, le mérite revient souvent aux gens qui sont les plus convaincants et non pas à ceux qui ont lancé l’idée en premier!
Malheureusement, son rapport fut plutôt reçu comme une anecdote.
Aujourd’hui encore, la littérature médicale est tiède à considérer Dr Ludwig Rehn comme ayant été le « père » de la chirurgie cardiaque.